20 nov. 2011

[Poé] L'épine dorsale du Monde


Enfin, derniers pas  – je n’y crois pas, la voilà sous mes yeux

La chaîne, hauteurs spinales de l’étrange Atlas qui soutient l’univers
Où les neiges éternelles convertissent les rares mortels à l’adoration du vide
Converti mon poitrail aux caresses du vertige : l’épine dorsale du monde !

Ici, les aiguilles sont des trônes, les glaciers des absides
Les platiers des autels d’où les pins noirs s’élancent vers le bas – lentement
Et le vent fou les déchiquette à coups d’anticyclones

Là-haut, la montagne et le ciel s’embrassent ardemment
Quand les préliminaires sont finis, ils transpirent, se lient dans un chaos
Rocheux – de leurs buées (c’est chaud) naissent nuages et cristaux

Les moraines s’écoulent et les crêtes hérissent leurs vertèbres fragiles
Comme des griffes érodées, côtes géantes d’un thorax qui s’étire
Gémit profondément – craquements d’os – rires : un glacier, une âme

Tous ces débris anthracite et cobalt – quand soudain le paysage devient dément
Tout écarlate ! La beauté sort des crocs d'obsidienne, effilés comme des lames
Ça me mord au visage ! Ah ! Ça n’est pas amical ! Ça me bouffe ça m’

Arrache l’œil à sa cavité, le croque, le mâchonne sous des dents de granit
Le recrache en bouillie dans la poudreuse, rugit au nadir devenu zénith
Retombe en léthargie – mes mains ! qu’une aura bleutée cryogénise

Combien d’heures passées là-haut, là où le temps n’a aucune prise
Sans lui tout s’éclaire, tout est leste et rétractile – il n’avait qu’à mieux s’assurer
(Les étoiles seraient-elles les lumières d’une mégapole céleste ?)

Dorsale de douleur, les courants chauds ont fui tes veines
Pour entrer dans les miennes, alors que je me noie dans l’étendue
De tes montagnes et tes trouées – épine dorsale du monde !

Toute rongée dans ta chair moelleuse, dans ton flanc médullaire
Toi cordée de la Terre, toute infestée de Kobolds et de Trolls
Que l’on ne voit jamais – sauf dans la tempête qui naît, et dans le doute

La nuit tombée, je passe le col du fémur à tâtons, dans le froid, et au-delà
C’est la lordose lombaire. Vallée de l’ombre de la mort, déesse en pleine dépression
Glaciaire - et je prie - je récite en moi-même des tirades inconnues des Moghols
 
Les gangues léchant les parois de roc se font mes cris d'Abel et de Caïn
Le harpon des sommets empale d’un coup violent l'écrin du ciel 
Traverse la voûte et s’abîme, mâchoire fendue, qui pend, question-piège

Dorsale de douleur, les courants chauds ont fui tes veines pour entrer dans les miennes
Quand soudain je conçois clairement les relations entières et il neige
Difficiles d’une fratrie imbibée d’absolu (de l’éther) sur tes plaines escarpées

Es-tu l’antichambre obligée de mes louanges ? Son autoroute ? Son épée ?
Toi qui agrafe et coud la masse informe des deux nuages de Magellan !
L’épine fébrile et pointue c’est mon observatoire d’où je ne te lâcherai plus

Ô Toi, au-delà, Qui es-Tu ?? Qui es-Tu !?
Le jour paraît et il m'entraîne dans son élan








 













Description poétique / Narration vécue


novembre 2011   

2 commentaires:

ivan a dit…

ouais! j'aime beaucoup, c'est sensitif et vertigineux !

mais c'est quoi un Kobold ?

GS a dit…

content qu'il te plaise - assez élémental, comme tu disais

Un Kobold est une créature humanoïde qui vit dans les recoins ou les galeries des montagnes, des maisons.

Les anciens scandinaves et peuples germaniques les accusaient de causer les accidents de mines, ou de remplacer les minerais précieux par du cobalt (même étymologie - je pensais appeler le Blog KobAlt, mais c'était déjà pris), métal réel d'un bleu magnifique.