21 janv. 2022

[Kogikwot] Crève Zodiaque, crève !

 

< Leurs "auras" se dissolvent sous les feux de nos lasers et de nos pilules ; leurs "énergies" s'évaporent dans la lave de nos expériences chirurgicales et nos innovations conceptuelles ; en présence des sécrétions les moins étranges de notre biologie et notre astronomie, leurs "signes", leurs "archétypes" et leurs "ascendants" se flétrissent et chialent de dépit ; tandis que leurs "lieux de puissance" ne nous arrêtent pas une seconde – dénués de force et d'intérêt, pas même dignes d'être profanés, balayés sans retour par la plus légère entreprise de remodelage des milieux, des valeurs et des génomes [...] >
 
🗲 ♃ 🗲
 
— Winnie G. Stratton, "Eschaton Velocity: Accelerationist Spirituality & Neonihilist Revivals in Fiction and Non-Fiction" (2nd ed.), 2001, Polloi Press, pp. 779, trad. personnelle


Surface de Jupiter, sonde Juno, 2019



13 janv. 2022

[Kogi] Conscience de classe paranoïde #2 : version discordienne


< La conspiration n'est d'abord rien d'autre qu'une expression intuitive et légitimement paranoïaque de l'aliénation de la classe exploitée, en l'absence de conscience de classe.

Puis cette intuition est récupérée par la classe des "Prêtres" et des "Guerriers" à leur profit et intégrée à leurs récits de contrôle, de pouvoir et d'auto-justification.

Puis cette récupération est elle-même récupérée par la classe des "Marchands", transformée en idéal positif qu'illels embrassent, et tentent de réaliser.

Les décombres de leurs tentatives pyramidales nourrissent les récupérations récupérées, les instrumentalisations intermédiaires et les intuitions paranoïaques, depuis longtemps stratifiées en classes réelles, aux formes d'aliénation multipliées, innovantes et créatives.

Éris soit louée : les humains sont habiles en magie du chaos. >


— Diane Errata, Mame pratiquante, plagiant et faisant l'exégèse des aphorismes de l'anon esclave éclairée du bar

12 janv. 2022

[PWR] Paranoid class consciousness / Conscience de classe paranoïde ?

EN

< Conspiracy was just paranoid class consciousness, until it was instrumentalized by the 'priest' class. >

— Some enlightened slave at the pub the other night

FR

« La conspiration n'était rien d'autre que l'expression intuitive et paranoïaque d'une conscience de classe, avant d'être récupérée et instrumentalisée par la classe des "prêtres". »

— Une esclave éclairée dans un bar, l'autre soir


 

11 janv. 2022

[PWR] < Les conspirations sont réelles : elle se comptent par millions... >


< Tel que je le vois, il y a bien des rideaux, des passages et des chambres secrètes où les personnes puissantes tiennent des dialogues entendus, assourdis, malentendus. C'est juste qu'il en existe des millions, et personne – pas même les plus puissantes – ne peut se représenter un million de situations dont chacune possède ses particularités. Certains nœuds de pouvoir partagent certaines ressemblances avec d'autres, et d'autres ressemblances avec un troisième ensemble, avec ou sans recoupements, et tous restent singuliers, à la fois dans l'histoire et au présent.

Il existe des vortex de pouvoir qui se perpétuent de génération en génération, en vue d'objectifs relativement stables et globalement nocifs pour de larges populations, mais ces nœuds de pouvoir offrent toujours une combinaison changeante d'éléments inattendus et d'éléments anciens. Individuellement, nous manquons à la fois de mémoire, de données et de capacité d'analyse pour identifier les signes pertinents, évaluer les changements de contexte, comparer les échelles, percevoir le moment où telle opération se fragilise, où tel évènement se conjugue à d'autres, où tel réseau d'influences est susceptible d'entrer en jeu ou de se heurter à tel autre.

Le problème étant que la complexité de ce qu'on appelle un peu vite "le pouvoir" est assez profonde pour admettre des lois simples mais partielles, convaincantes mais temporaires, bref, tout un lot d'explications semi-efficaces et bancales. Portées ou non par des intentions claires, certaines de ces explications prennent de l'importance, et deviennent à leur tour des filins dans le nœud en question. Le coup d’œil n'est pas exclu, mais est-il désirable ? L'intuition ne tient pas, pas même pour juger des sources de l'info, de la confiance factuelle, selon telle définition précise de l'objectivité.

Il existe bien des plans mondiaux, qui visent l'Histoire humaine entière, la postérité, les valeurs présentes et futures, le récit du passé, la Culture, les rapports entre des peuples, des dispositifs et sociétés entières, mais encore une fois : il en existe des centaines de milliers. Certains sont détaillés au risque des schismes et de l'erreur fatale, tandis que d'autres sont généraux, mercenaires et anonymes. Certains sont à peu près réalisables, et parfois par erreur, d'autres sont très peu réalisables, et parfois à dessein. Certains sont peu lucides et d'autres résistent à la mort de leurs premières impulsions et intentions. Tous possèdent des points aveugles, et de nombreux sont grevés de contradictions terminales et définitives, ce qui ne les empêche pas d'exister et d'avoir des effets. Certains de ces plans mondiaux sont raffinés, hautement justifiés, et d'autres peu réfléchis et arbitraires. Des plans volatils, ancrés, institutionnels, fluctuant, tectoniques, secrets ou publics. Tous se recomposent au fil du temps, certains au ralenti et d'autres en accéléré, certains se clarifient et d'autres s'obscurcissent. Les plans mondiaux ne sont jamais totalement protégés d'une résurrection inattendue, même hérétique ou involontaire.

À propos du secret, de la confiance et de la paranoïa : la critique journalistique du complotisme n'explique pas très bien les choses. Parce qu'il existe des secrets d'État, et aussi des secrets au-delà des États, et des secrets en-deçà. Le secret lui-même est très surestimé : lié à des nœuds de pouvoir, il possède toujours un coût et des risques. S'il implique beaucoup de gens, il sera limité dans le temps, grevé de nombreuses interprétations et défaillances. Mais s'il est peu partagé et très violent, la défaillance d'un seul maillon entraîne des conséquences désastreuses. Le secret radical n'est pas souvent désirable ni nécessaire. Ses échelons, ses modalités et ses conditions pratiques sont très diverses. Mieux vaut convaincre et tronquer. Régner par la compromission, la technicité, partager les gains. Non seulement le secret ne peut exister sans institutions et dispositifs de contrôle, mais il n'a aucun intérêt sans ces institutions. Or dans la plupart des scénarios ou des récits conspirationnistes, la forme et les enjeux du secret sont tout bêtement présupposés.

Les conspirations réelles sont quant à elles, pour beaucoup, cachées au grand jour : dans les rapports de classe, les intérêts financiers croisés, les stratégies semi-légales, le cumul des masques translucides – cachées dans les piscines de lait et les mines sel, cachées dans les complexités du droit, des amitiés, des algorithmes, des controverses scientifiques, des secrets industriels, des héritages, des budgets, des restructurations et des subornations, des verrous judiciaires et des audits, des services "d'observation" militaires – noyées dans les arrestations politiques, les incorporations professionnelles des chefs de file, les guerres journalistiques, les réunions d'audimat, les compétitions professionnelles, les reconversions de mercenaires. Dans la fange infinie de notre manque d'attention, de mémoire et de temps.

Même lorsqu'ils existent, les secrets réels n'ont pas la portée révélatrice ultime qu'ils possèdent dans l'imaginaire complotiste, qui postule qu'un secret serait toujours un signe de l'avènement du Mal absolu, infiniment nouveau et pourtant prévu depuis toujours, un Mal dont l'incarnation doit toujours commencer par être cachée. Son influence insidieuse est généralisée, seulement connue et reconnue d'un petit nombre. Le caractère pervers est suggéré plutôt que démontré : ce n'est jamais la nocivité qui prouve que ce Mal est mauvais, mais son aura malsaine, son essence antimorale, qui est ensuite rationalisée de manière secondaire à l'aide de crimes blasphématoires (cannibalisme, viols d'enfants, sacrifices, auto-mutilation, perversion des mœurs, profanations, pactisation, polymorphisme, croisement des genres, bestialité...).

Le mal réel ne provient jamais d'un front unifié : c'est l'ensemble des effets de la peur, de la confusion, de la cruauté, des justifications mensongères, des mensonges justifiables, des faiblesses, des idioties, des fascinations, des emportements, de l'indifférence active, des souffrances, des maladies, et au plus profond, de la rencontre d'intérêts vécus comme incompatibles – à tort ou à raison. Comparé à l'impureté du "mal" réel, à la pluralité de ses sources, ses formes, ses degrés et ses ressorts, le jugement complotiste apparaît le plus souvent comme un réflexe compensatoire dans un monde complexe et moralement illisible, qui se cristallise sur un récit "alternatif" de la minorité persécutée, à teneur apocalyptique. Bref : si vous voulez du vrai pouvoir inquiétant, allez voir du côté de Cambridge Analytica, des hauts fonctionnaires et des flux financiers, et moins du côté du satanisme ou des grandes réunions "internationales".

Quant aux secrets réels, qui importent, la difficulté n'est pas seulement de les découvrir, mais de les interpréter – avec de très nombreux cas d'alternatives incertaines, de projets idéalistes qui tournent mal, de jugements hypocrites ou a posteriori, de responsabilités diluées ou de bénéfices partagés, au milieu des très nombreux cas d'injustice systématique, de torture, de désertion criminelle, d'inconscience "éclairée", de dépossession dévastatrice, d'abus de pouvoir, de révisionnismes acceptés, ou de massacres oubliés. Le grand secret, c'est celui de la fragmentation délicate à l'extrême du pouvoir et du mal, et de leurs liens, entre généralités banales et cacophonie des situations.

La prolifération des demi-vérités, des intentions incertaines, des faux secrets, des fausses opérations de vérité témoigne surtout du fait qu'il n'y ait pas de blocs totalement isolés, et encore moins deux blocs tout court. Cette prolifération témoigne de la diversité semi-éclatée, semi-imbriquée, des agents, des lois, des groupes et des capacités : avant toute autre chose, les "mensonges gris" sont une simple conséquence de la répartition inégale de l'information et de ses dynamiques chaotiques. Cela se vérifie à l'échelle des vies, des groupes locaux, des sociétés, à l'intérieur des larges consortiums comme entre les monopoles d'État, dans les communautés culturelles ou entre les communautés d'élection.

Toutes les techniques d'influence grises sont uniques, changeantes, et coûteuses : toutes ne sont pas rentables sur tous les plans et dans toutes les situations. Entre l'astroturfing, les psy-ops, les false-flag operations, les front organizations, le greenwashing ou autre x-washing, les techniques de manipulation de l'opinion, de la décision et le nudging, les ads ciblées, les fausses promesses de forme ou de contenu (hedge funds, tests en laboratoire, vente de données personnelles...), les agents provocateurs, les cinquièmes colonnes imaginaires, simulées, dramatisées ou réelles, l'optimisation fiscale, la fraude acceptable, la désinformation intentionnelle, justifiable ou non, jusqu'aux courants d'analyse économique ou historiographiques – rien n'est anodin, équivalent, inoffensif, et rien ne justifie une vision simple des situations.

Même les modes de production les plus mensongers de l'information exigent une matrice complexe pour être analysés correctement, et ne peuvent se rapporter aux couples secret / révélation, faits scientifiques / illusion stupide, ou élite / masse. Il faut tout transposer sur des grilles de formation / contrôle / répartition de l'information qui contiennent toujours des dizaines d'acteurs, des centaines de degrés, divers genres de gagnants et perdants, et des milliers d'arrangements temporaires. À travers leurs structures et leurs effets axiologiques, les systèmes de légitimation des institutions, les machines de l'opinion et les courants de la culture sont doublement nécessaires pour dresser un diagramme dynamique des choses cachées.

La difficultés pratique à suivre tous les fils, appliquer des critères, se former en continu, pour assembler un tableau idéal, est sans cesse redoublée par une autre : la difficulté fondamentale à interpréter le sens de telle révélation réelle et particulière, pour la juger et y répondre. Le jeu est compliqué, mais nécessaire, et cette contradiction concrète ne devrait plus nous surprendre, à commencer par notre implication du côté des secrets, des spoliations et des machinations, notre marge de pouvoir, nos jeux d'indignation, nos marchandages, nos idoles acceptables et nos aspirations incompatibles.
Il existe des allégeances radicales, des allégeances cachées, des allégeances doubles, mais leurs valeurs finales, leurs conséquences ultimes et leurs évolutions probables ne sont pas univoques, depuis le niveau biographique jusqu'à celui de "l'histoire". Les idéologies partagées participent largement de la répartition des courants et des forces : leurs immenses faiblesses sont parfois plus aveuglantes que dissuasives. Les révolutions ne servent jamais qu'un seul maître, et se limitent rarement à produire les effets attendus.

Il y a bien des moments de concentration de la décision, des "sphères" ou quotidiens incommensurables avec d'autres, et des systèmes qui s'emballent et brûlent des millions de vies. Quelques millions de situations sur des dizaines de milliards, et sans compter les exceptions... >

— Kim, en roue libre, jouant le rôle de quelqu'un qui voudrait impressionner une pote sur le sujet "Comment faire la différence entre les vraies conspirations et les stupides en un coup d’œil ?", Zoom, 2021



C'est probablement moins révélateur que prévu.


10 janv. 2022

[PWR] Shifting valuation, political revolutions and their appraisal


< Because no event has one meaning, my friend. So it's not just that the analysis of Revolution is usually misguided in terms of practical goals, cultural conditions and material requisites – I mean, it usually is –, the real hurdle is more like being able to read inside the mayhem of who is going to appreciate what in the end and why, so what goes on with the drift of values themselves, and therefore, the establishment of hidden meta-values, how revolutionary actors inevitably change positions and interests in their partial success, with the partial return of old structures, and so on... >

— Val, jokingly explaining to me how and why the Third Covenant Revolutionary Front had to be dissolved in order to succeed in the end, on Zoom, 2020