< Je
nage et un poisson
Dans le
lac vide, après la pêche miraculeuse
M’effleure,
froid et glissant, la peau de la jambe
Je
vois dans l’eau cristalline
Et
noire pourtant
Le
poisson d’or s’enfuir
Et je
vois ses branchies noires
Sur
son corps éclatant
Ses
barbillons d’encre et ses branchies d’obscurité
Je
frémis
Je
viens de sentir le rêve s’enfoncer dans mon crâne et ma peau
Comme
un tube ou un percolateur
Et le
cauchemar commence, je me souviens
Le
poisson fait demi-tour
Ses
yeux sont injectés d’une lueur maligne
Je
veux bouger mais les muscles sont lents
Le
petit poisson fait le tour de moi et en faisant mine de
Ne
rien remarquer, il s’introduit en moi
J’ai
trop honte
C’est
viscéral
Il
est chez lui
Le
nid de la luxure
Le
cauchemar continue, c’est un peu flou après, je crois que
JE CROIS
A JESUS-CHRIST LE FILS, VENU POUR PORTER LES
Soudain
je toussote, quelque chose dans la gorge
Et je
recrache et je dégorge des lambeaux du poisson
Que
s’est-il passé dedans – à cet instant je décorpore, je me dédouble
Et je
vois les lambeaux, les
Déchirures
vivantes, peaux de la peau, se couvrir d’yeux méchants
Et
les yeux se couvrent à leur tour
D’écailles
et de paupières, couche après couche
Les yeux ouverts comme des plaies – des
plaies qui
Respirent,
des branchies de regards et de peur – des yeux germent sur les yeux, des
Yeux
sur la surface de la cornée, des trous dans les
Trous,
qui me regardent dans les yeux et creusent
Mon
corps mou et poreux
D’entailles
sévères, j’te jure
Sur
les yeux des écailles – de dragon – comme des lames de rasoir sur
Lesquelles
poussent des yeux de félins, de poissons, de patates, encore
J’ai
vu – des tâches devenir des creux, des creux se remplir d’aveuglement
Et
l’œil devenir une simple cicatrice, remplie de chair de patate
Des
écailles couvrent les yeux, des yeux germent sur les écailles
Des yeux
poussent dans les yeux et dans ces yeux, des écailles se reflètent
Soudain
les kunaï se détachent et tombent dans les yeux par l’intérieur
Les
ombres d’écailles oblongues et pointues
Crevant l’écran rétinien par l’arrière,
percent et tuent
Percent les yeux puis les yeux dans les yeux
Ils
ont tous la forme d’une feuille d’acacia pointue
Par
milliers
Orbites crevés, ballons d’eaux qui éclatent, éclaboussent mon visage
Laissant
un trou béant d’où coule un tout petit filet de sang
Et le rêve continue
Car
le trou s’agrandit, s’agrandit, s’agrandit
Devient
géant, il vrombit et respire, le trou géant
L’estomac de baleine dans lequel
je venais
Prier,
une fois, deux fois
Dans
l’estomac de la Baleine qui inspire, expire
Inspire,
EX-PRIE, inspiré, EXPIRÉ !
Il se
remet lentement de la panique et la douleur
Soulève
sa masse de vide et s’étire à en pleurer de mal aigu
Je
peux sentir l’air saturé du silence de douleur, de la silice de brûlure
J’en
pleure (x3)
Mes
draps sont trempés de sueur, et les médecins s’inquiètent
Le
programme leur échappe
Je me
dédouble, je vois mon corps étendu, et eux autour
Mais
simultanément je vois aussi
Le rêve qui continue
Le
trou Béant est devenu un abîme-Roi
Un abîme-Roi qui n’a fait qu’une bouchée de
la Reine
Je
vomis de vertige, et sur le lit, attaché, je me vois
Mimer
comiquement du rêve le vomissement
La
Bouche immense respire et elle couvre toute la Terre, Tout l’espace
La
Terre est une bouche inversée, un trou, vous voyez ?
C’était
pas un trou noir, qui sont vraiment des boules de boules chair denses à mourir
Non,
c’était comme un gant retourné sur lui-même
Un gant de chair et de douleur,
qui prenait toute la place
Et je suais, et je suais, et j’en pouvais plus
Mais
le rêve continuait
Et le
rêve continue
Des
cornes commencent à pousser dans la Bouche, des cornes immenses qui sont des
dents, et des dents sur les dents, des écailles sur les dents et soudain l’ŒIL IMMENSE
DONT LA BOUCHE S’EST DENTÉE S’EST OUVERT
La
vision me frappa de terreur et mon corps se raidit – et je fus comme mort à mes yeux (x2)
Des
êtres vinrent autour de moi, j’entrevoyais leurs silhouettes
Et
par ce qui semblait de nombreuses ailes couvertes d’yeux
Ils me portèrent au
sein du Très-Haut, dans l’Antichambre du Ciel sans numéro
Où
les Archanges revêtent l’habit et cessent d’être nus
Où ils bandent leurs
yeux de tête et sont vus en devenir
Replient deux des paires d’ailes supérieures et laissent leurs
plaies ouvertes
(Stigmates ou insignes
militaires de combats immémoriaux)
Je fus porté comme mort entre les chants
des vivants et des morts
Et les grincements de dents des gris-dehors-"Je-ne-vous-ai-pas-connus"
Sauvés-comme-au-travers-du-feu qui ont perdu la récompense
Mais
"vivent" éternellement
Je
suis porté devant des trônes et des livres ne sont pas ouverts – mais un petit
carnet. Il m’est dit :
« Tu as vu le SERPENT qui se
fait appeler ‘éternel’, il est pourtant né
Tu l’as vu, le menteur, créé lors
du sommeil de Dieu, de son repos le septième jour
Pour l’intérim, limité, divin et
partagé –, angélique
Créé par le silence de Dieu, aussi
puissant que sa parole, Dragon-dague
On l’appelle Marduk-Bhaal ou
Moloch-Astarté, Hermès-fff ou Mythraaaarhysssstryyysssrrrtx#74*9
Mère protectrice des Déva, maître et père de toute androlâtrie, trompeur !
Tu as vu celui-ci dans sa défaite
: rongé par lui-même, principe de destruction
Il se détruit lui-même, très logiquement, ainsi le mal qui ronge le Mal
Il ne veut plus se mentir à
lui-même et ça le tue, il ne veut plus tuer ses sbires
Mais il ne peut faire
autrement : sa cohérence paradoxale, c’est le meurtre
De soi et puis l’automutilation,
et la puissance qu’il gagne se déloge aussitôt
S'oppose à l'unité, à l'éternel, à l'édifice, Ahriman bouffant Shiva, imite et
tord
Recopiant à l'envers l'univers et le divin, reproduit pour un temps, égare et
abuse
Tu as croisé l’impossible – il
s’agit du reflet de la Lumière, l’Ange damné par excès-lance
Lumineux, Lucifer, le porteur des
louanges court-circuitant le canal-flux
Mais au jour du jugement il ne
goûtera pas du Léviathan ni même de
Béhémoth, corps préparés-cachés pour le repas des Saints, manne, pain
Poissons et sang-vin (les paniers
de restes de ce festin
Seront les victuailles pour
l’éternité) – Tu as vu l’Aveuglement qui
Procède, immonde Protée, de la
procréation de la lumière et de la nuit
Une fois coupée de l’origine, de
la source divine, naissent des horreurs
La source de Vie ; et la
Bouche qui en sort est le désir inassouvi né des
Yeux aveugles. Tu connais, tu as
vu, alors va, et publie ! »
Puis
l’on me toucha sur le front et la vie coula dans mes veines à nouveau >