31 mai 2012

[Poé] Sillage de bulles


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            « Tu es l’écume » ! – Ismahane m'écrit
                                     L’écume. Je suis l’écume. Comme un renom d’argent sur les plus hautes collines de l’océan – rumeur de glace, fragment d’éther passager clandestin, ardent collier bâtard, je suis l’Écume.
             Je suis l’écume et je sillonne les mondes en perdition – née du ciel unique pris dans leurs failles multiples (micromailles ou tubules) – produit liminal, rugissant, du noyé en lui-même – lie de l’empyrée noire, je couronne l’invisible ciel translucide à coups de Voie Lactée… 
                                            Bruissement immortel du pas des prophètes, tranchant et crête de leur message et messager ultime du déluge – comme un sillage de bulles tatouant les masses noires – je surfe sur les franges du réel, bordant ses lames de fond, les rongeant d’innocence – je suis la giclée dans le seuil, l’explosion dans le rire, la rage cachée dans les paroles !
                           Respiration poreuse de la mer, à tout instant… j’expire et ressuscite !
 
             Suis-je un chemin ? L’écriture du dieu ? Je suis l’écume et je ne dors pas, comme l’humain épandu sur l’épiderme de la planète enceinte – prise dans les douleurs de l'accouchement – prise dans le jeu de ses anomalies, telles quelles, ni heureuses ni dystociques !


(c) Hakateyama

17 mai 2012

[Loud!] L'Aleph, Jorge Luis Borges


 Aleph

Aleph. La lettre ou le glyphe de la tête du taureau, perdue dans le labyrinthe des alpha-bets, des âmes, des âges. Qui d'autre qu'une lettre porte une tête de Taureau, perdu lui aussi dans un... monde ?

Vous le saurez si vous lisez

l'Aleph, c'est aussi ce recueil de nouvelles de Jorge Luis Borges, écrivain et homme parmi les hommes parmi les femmes - réceptacle et synthèse multiple, bandeau apposé sur la conscience qui pourtant recueille... Recueille les emprunts d'une histoire : Borges, emprunt d'Argentine et de Grèce, de Saga et de métaphysique occidentale, empreint d'Allemand, d'Anglais, de l'idée d'un tissu impossible à déchirer, impossible à dénouer - un tissu total et immortel qui défie même l'intervention de Dieu.

Vous saurez comment si vous
 
Osez lire le texte qui se transmet de la main à l'oreille et de l’œil à l'esprit. Deux traducteurs ont écrit à nouveau, l'intelligent Roger Caillois en tête, du mieux qu'ils pouvaient, ces nouvelles bouleversantes. Ils ont traduit les fictions qu'un homme a reçu, catalyseur et canal des expériences, déductions, étonnements. Le texte se transmet jusqu'à moi et j'accepte de lire - est-ce irréversible ?

 Les mystères de la fiction ne semblent pas suffire

Osez remplir votre sommeil de ces flèches aux parcours tortueux mais faciles à suivre - que le tissu d'une intuition nouvelle du temps fasse jour dans vos nuits ! émerge à la conscience !, pourquoi pas, sous le manteau inoffensif du plaisir, du suspense ou du retournement final. Des images poétiques monumentales vous attendent ici, des voyages si longs que Borges les raconte en fonçant - par un passage à la limite.

 Face au mystère de la filiation, demandez

Qui est Emma Zunz, Azevedo Bandeira, et qui sont ces théologiens jumeaux ? Comment parler de ces nouvelles qu'il faut relire sans perdre la foi ? Est-ce là l'union du doute et de la certitude ? Ou de la philosophie incarnée ? C'est-à-dire quelque chose comme... un voyageur qui marche et - aux passants assez vifs pour l'écouter - pose la question dont le chiffre est tatoué sur son front, glyphe brûlant de sa destination introuvable...

Votre vie n'est pas exempte

D'énigmes (au pluriel), nous irons à l’Énigme (au Singulier - de la vie singulière). Qui d'autre que vous a vécu dans la demeure infinie et mouvante que nous appelons aisément l'univers ?

Regardez autour de vous : des murs, au-delà : l'univers, votre demeure infiniment mouvante. Et si le temps lui-même n'était qu'un nom, un masque, de l'univers ? Qu'avaient-ils d'autre, et qu'avaient-ils d'éternel ?

Le texte se perd dans des visions de femmes, d'hommes, de créatures et d'animaux - le flou d'avant le sommeil ou d'avant la mort (peut-être), où se confondent le palais et la grotte...

Jadis confondus par mégarde, par vanité ou par aveuglement, confondus ici par lucidité...

  
l'Aleph, recueil de nouvelles écrites par Jorge Luis Borges, parues Argentine entre 1947 et 1952

Traduction par Roger Caillois et René L.-F. Durand 
lues dans l'édition de l'Imaginaire, Gallimard

5 mai 2012

[Poé] Les enfants


Nous les enfants
Feraient sauter le monde à la T.N.T. si
Sortions de l’enfance à l'
Instant, nous, né.e.s du jeu et
Nu.e.s de jouets


Enfants. (c) Bruno Steven